Le Colonel
Tom Parker a fait d’Elvis Presley, dont on commémore aujourd'hui le décès, une star mondiale en l’espace de quelques années.
Sur le plan
du marketing et de l’image, le Colonel Parker a fait preuve d’une efficacité redoutable
dans la promotion des disques et des produits dérivés à l’image du King.
Il est
impossible de comprendre le succès d’Elvis Presley sans jeter un coup d’oeil
sur la stratégie de marketing du Colonel Tom Parker.
Voici donc
comment l’homme qui gérait la carrière du King a
révolutionné la façon de mettre en marché les stars de la musique :
1.
Choisir le bon produit
En janvier
1955, le Colonel Parker (de son vrai nom Andrea Cornelis van
Kuik) entre en contact pour la première fois avec Elvis
Presley.
Au vu des réactions des spectatrices, Parker signe un contrat avec
Elvis et se retrouve éventuellement comme le seul responsable de la carrière du
chanteur. Il dira plus tard qu’Elvis était un mélange de Marlon Brando et de
James Dean.
Mais
attention : le Colonel Parker ne s’intéresse pas à Elvis pour les paroles de ses chansons « I Want You, I Need You, I Love You ». Il
s’intéresse à son extraordinaire potentiel commercial.
D’ailleurs,
Joan Deary de la maison de disque RCA se plaira à répéter que le Colonel était
sourd, donc incapable d’apprécier les talents artistiques du King.
2.
Peaufiner l’image de la star et du manager dans les moindres détails
En 1958, au
faîte de sa carrière, Elvis est contacté par l’armée pour qu’il fasse son
service militaire et donne des concerts gratuits pour stimuler les troupes
américaines à l’étranger.
Sans surprise, ce développement ne plaît aucunement
au Colonel Parker. Mais rapidement, Parker comprend qu’Elvis n’a pas le choix.
C’est une question d’image. Elvis ne doit pas recevoir de traitement de faveur.
Contre
mauvaise fortune bon cœur, Parker persuade Elvis d’effectuer son service
militaire comme tout le monde afin d’éviter d’alimenter le mécontentement des
vétérans, des familles de militaires, des sénateurs, des politiciens et
ultimement, des fans du King du rock and roll.
C’est dans
cet esprit qu’Elvis se fera couper les cheveux devant les caméras – un événement
médiatique à l’époque ! Ce faisant, Elvis se défait graduellement de son image
de mauvais garçon des années 1955-1956 attribuable à son célèbre déhanchement
suggestif, ses habitudes vestimentaires et ses problèmes avec la police.
Il devient
lentement un pur symbole de l’Amérique et une icone de la culture populaire – un symbole alimenté par les futurs
rôles qu’Elvis tiendra au cinéma et pour son amour pour sa mère.
Parker est
également convaincu qu’Elvis doit prendre une pause dans sa carrière, ce dernier prenant
dangereusement goût à la célébrité et aux excès qui l’accompagne.
Lorsque le
King débute son service militaire, le Colonel ne permet pas à Anita Wood, sa
copine de l’époque, de l’accompagner en Allemagne, jugeant que la présence de
celle-ci pourrait avoir des effets néfastes sur la popularité de son « poulain
».
Quand
Elvis, 28 ans, tombe en amour avec une certaine Priscilla, 14 ans, pendant son
séjour dans l’armée américaine, le Colonel Parker comprend les dangers qui
guettent la star.
Après tout,
le Colonel sait que quelques années auparavant, Jerry Lee Lewis a saboté sa
carrière en tombant en amour avec une cousine mineure.
Lors du
mariage du King, c’est d’ailleurs le Colonel qui veillera à chaque
détail : bague, célébrant, invités, salle, etc.
Ajoutons
que les contrats avec les studios d’Hollywood impliquant Elvis contiennent des
clauses « morales » et que le Colonel craint, plus que tout, les poursuites
pour paternité.
En
visionnant le film Viva Las Vegas dans lequel Elvis tient le rôle principal
avec Ann-Margret, le Colonel constate à quel point l’actrice aux cheveux teint
en roux crève l’écran et vole la vedette à Elvis.
Conscient
de la couverture média qui s’en suivra, Parker fait des pressions auprès de MGM
pour que le studio d’Hollywood maximise l’effet Elvis dans les publicités et
dans le montage du film. Ainsi, sur les trois duos enregistrés lors du tournage
du film, un seul apparaît dans la version finale de Viva Las Vegas et aucune de
ces chansons ne deviendra un single avant la mort du King.
En
préparation du tournage de Blue Hawaii, Parker convainc Elvis de se
remettre en forme, car se dernier a pris plusieurs kilos, résultat de ses
mauvaises habitudes alimentaires et de sa consommation abusive de médicaments.
Pire
encore, quand débute le tournage de Clambake, son 25e film,
le réalisateur constate qu’Elvis pèse plus de 200 livres, 30 de plus que lors
de son film précédent !
À l’époque
où le Colonel Parker se cherche un nouveau chanteur pour son écurie, il offre
ses services à Jimmy Davis, qui est chanteur de country mais aussi
candidat au poste de gouverneur de Louisiane.
Quand Davis
est élu, il décerne à Tom Parker le titre honorifique de « Colonel ». Par la
suite, Parker se fera un devoir d’utiliser toute sa vie le titre de Colonel en
rappelant que pour réussir en affaires, « il est essentiel de connaître les
personnes d’influence ».
3.
Briser les conventions
C’est en
1939 que Tom Parker devient pour la première fois manager de Gene Austin, un
chanteur country. Quelques années plus tard, il devient le gérant d’un autre
artiste du country, Eddy Arnold, pour lequel il innove en initiant la vente de
produits dérivés avant les spectacles.
Dès octobre
1955, Parker qui agit alors comme « conseiller spécial » d’Elvis, négocie un
contrat d’enregistrement pour Elvis chez RCA.
En 1956,
Colonel Parker brise à nouveau les conventions. Alors que d’ordinaire, les
directeurs artistiques d’une maison de disque choisissent les chansons que
leurs poulains vont interpréter, Parker insiste pour qu’Elvis puisse
sélectionner son propre répertoire. RCA finit par céder.
Parker
innove aussi sur le plan du partage des revenus : initialement, il prend 25 %
de la cagnotte d’Elvis en plus des frais de représentation – hôtels,
restaurants, déplacements, etc. Pour les spectacles, c’est un tiers pour lui et
deux tiers pour Elvis.
Le Colonel
Parker exigera éventuellement 50 % des revenus de la vente de disques plutôt
que les 10 % habituels. C’est sans compter l’argent liquide que le Colonel va
collecter directement des promoteurs et dont Elvis ne verra jamais la couleur.
Le Colonel
Parker va aussi insister auprès des promoteurs pour recevoir entre 50 et 60 %
de l’argent des ventes de billets à l’avance. Il ira jusqu’à demander des
garanties financières au moment de la signature des contrats.
4.
Prendre des risques
Lorsqu’un
promoteur apostrophe le Colonel Parker pour essayer de comprendre pourquoi
Elvis donne des spectacles dans des villes comme Monroe (Lousiane) et
Greensboro (Caroline du Nord), le célèbre gérant d’artiste (on dirait
aujourd'hui imprésario) répondra : « précisément parce que personne
d’autre n’y pense ! »
À l’été
1972, le Colonel plutôt frileux à l’idée de faire chanter Elvis à New York,
prend une chance et réserve trois dates consécutives au Madison Square Garden,
une première pour l’époque. Fort du succès en prévente, une 4e date
est ajoutée, un exploit unique dans les années 70.
En 1956, le
Colonel Parker accepte 40 000 $ d’Hank Saperstein pour faire d’Elvis une marque
qui apparaîtra désormais sur plus de 68 produits, dont une poupée, une marque
de rouge à lèvres, un bracelet, etc. À la fin de 1956, l’entente a déjà généré
des revenus de 22 millions $.
Signe que
rien ne l’arrête dans sa quête du profit, Parker met en vente sur le marché des
macarons sur lesquels on peut lire « I Hate Elvis » (je déteste Elvis, en
français), histoire de faire des sous avec les fans comme avec les haters…
5.
Opérer un contrôle total sur la communication
Le Colonel
Parker impose des conditions sévères aux gens qui entreront en contact avec
Elvis en plus de veiller personnellement à la publicité, aux commanditaires, au
calendrier médias et à la conception des affiches du King.
Le Colonel
opère un contrôle drastique sur le chanteur, refusant la plupart des demandes
d’interviews, dans les magazines comme à la télévision.
Dans le
même sens, le Colonel Parker interdit toute communication directe entre les
médias et Elvis Presley.
Lors des
diverses communications de la star, Parker prendra soin de signer
personnellement chaque échange, allant jusqu’à co-signer les cartes de Noël du
King. Après les spectacles, il exercera même un certain contrôle sur la prise
de photos des fans, craignant qu’Elvis soit associé par la bande à un voyou.
En exerçant
ce contrôle, spécialement au moment du service militaire d’Elvis et son séjour
en Europe, Parker fut à même de construire plus facilement le « Mythe Elvis
» : celui d’un homme innocent, romantique et mystérieux, en amour avec sa
maman et ses fans.
Lorsque la
popularité du King connaîtra un sursaut après le retour d’Elvis sur scène aux
États-Unis, il ira même jusqu’à annoncer à Kay Wheeler, responsable de la
gestion du fan club du King, que dorénavant c’est le Colonel qui s’occupera du
fan club et que celui-ci sera payant.
C’est sur
ce plan que le Colonel Parker se démarque le plus de ses collègues de l’époque
qui se contentaient le plus souvent de réserver des dates de concerts pour
leurs poulains.
Et Parker n’en manque pas une. Lors de son passage à NBC en
1968, une clause particulière permet à Parker d’utiliser la bande-son de
l’émission pour en faire un album.
Lors du
passage du magazine Life en Allemagne, il exigera d’ailleurs la coquette
somme de 25 000 $ pour laisser le photographe prendre quelques croquis du King
devant des baraques militaires.
Pourtant,
en avril 1956, Parker commet un rare impair lorsqu’il signe Elvis pour une
série de spectacles à Las Vegas. Le Colonel dira plus tard qu’il a fait une
erreur de public cible ; les fans d’Elvis sont plus jeunes que les amateurs qui
peuplaient les salles de spectacles de Las Vegas dans les années cinquante.
6.
Maintenir la cadence
Pendant
l’absence d’Elvis en Amérique du Nord, Parker ne se contente pas de gérer les
petites amies du chanteur. Il comprend aussi qu’il doit alimenter virtuellement
ses fans en musique s’il ne veut pas perdre leur attention. Car rien n’est plus
infidèle musicalement qu’une jeune adolescente.
Pour cette
raison, le Colonel Parker va sortir régulièrement des singles enregistrés avant
le départ du King pour l’Allemagne, une idée de génie pour l’époque. Cela lui
permet de combler le vide laissé par l’absence du King.
Évidemment,
Elvis craint que les jeunes filles passent à autre chose pendant son absence de
deux ans de la scène musicale. Mais à son retour au petit écran le 12 mai 1960,
dans une émission animée par Frank Sinatra, le King comprend que la magie opère
toujours et que la stratégie de communication du Colonel Parker a fonctionné.
Mieux
encore, durant son absence pour cause de service militaire, le Colonel Parker
génère 3 millions $ en revenus
promotionnels seulement, une industrie naissante à la fin des années
cinquante. En outre, ces revenus pour tourner dans des films passent de 200 000
$ à 300 000 $.
7.
Multiplier les plateformes de visibilité
Durant sa carrière,
Presley tourne dans 31 films, autant de plateformes et de prétextes à danser et
chanter la pomme à de jolies filles, dont Ann Margret. Dans certains cas, le
tournage de ses films ne prend pas plus de 32 jours !
Pour le
Colonel Parker, ces films permettent de vendre des disques et des billets de
concert et de garantir la visibilité du King à l’extérieur de l’Amérique sans
avoir à se déplacer.
Avant son
temps, Parker comprend que la bande-son du film contribuera à vendre des albums
et des microsillons. Pour cette raison, chaque film devra compter au moins
quatre chansons d’Elvis, idéalement cinq ou plus.
Lors de son
premier film, Elvis reçoit 15 000 $, puis 20 000 $ pour le second, 25 000 $
pour le troisième et jusqu’à 100 000 $ pour le septième. Parker signera par la
suite des ententes avec Mirisch Brothers, MGM et United Artists à hauteur de
500 000 $ par film.
Chose
étonnante considérant l’omniprésence de Parker dans la vie d’Elvis, le Colonel
ne tient pas à opérer un droit de regard sur les scénarios de films ou le choix
du directeur. De son côté, Elvis est furieux de jouer dans des films aussi
médiocres.
On sait
aujourd’hui que Parker ne croyait pas au talent de comédien d’Elvis, même si ce
dernier, pour le convaincre, se plaira à réciter des scènes entières du film Rebel
Without a Cause durant leurs interminables déplacement aux États-Unis dans
son autobus de tournées.
Cela
n’empêchera pas Elvis de devenir éventuellement le comédien le mieux payé
d’Hollywood, un exploit remarquable considérant la qualité des films dans
lesquels Elvis joue le rôle du tombeur incompris ! Mais l’acharnement du
Colonel à tourner des films de séries B finira par coûter très cher à Elvis.
Ceci dit,
quoiqu’on pense des films d’Elvis et de la stratégie du Colonel Parker,
Hollywood a permis à Elvis de faire des tonnes de $$$ à une époque où les
ventes de disques se font plus difficiles pour la star, spécialement dans le
contexte des rassemblements peace and love, l’arrivée des Beatles et des
Rolling Stones ainsi que l’époque psychédélique qui s’en suivit.
Car Elvis
n’arrivera jamais tout à fait à s’adapter à la nouvelle culture musicale des
années 60, bien que son spécial « ELVIS » organisé par Steve Binder donnera à
NBC sa meilleure cote d’écoute en 1968.
Par la
bande, le succès de visionnement de ce spécial TV (une rare émission mettant en
vedette Elvis à la télévision) permet à Elvis de signer à Las Vegas un lucratif
contrat avec l’Hôtel International du magnat Kirk Kerkorian : deux
spectacles par soir, sept soirs par semaine, pour quatre semaines, une cadence
infernale à l’époque.
Pour
frapper l’imaginaire des fans d’Elvis et porter un grand coup dans les médias,
Parker organisera une campagne de publicité monstre – chaque panneau-affiche de
Las Vegas fait la promotion du spectacle à venir – et il diffuse une photo de la star signant son contrat devant l’Hôtel International en construction.
Une comédie
montée de toutes pièces pour mousser les revenus générés par la tournée de
spectacles et qui permit à l’hôtel de doubler ses revenus de ventes de billets,
de restaurants et de jeux.
8. Innover sur le plan de
l’utilisation des médias
En 1960,
lors de son retour aux États-Unis et en 1968, lorsque le contrat avec la MGM
est terminé, Parker rebondit en organisant les come-back d’Elvis, d’abord à la
télévision puis sur scène.
Sur ce
plan, Parker invente les retrouvailles télévisées (son spécial «Welcome Home Elvis » commandité par Timex avec Frank Sinatra en 1960 et « ELVIS » commandité
par Singer en 1968), les retransmissions satellites à l’échelle planétaire («
Aloha from Hawaii » en 1973) et le docu-concert (Elvis : That’s the Way ItIs) présenté à l’origine dans les cinémas en 1970.
En janvier
1973, le spectacle Aloha from Hawaii, présenté à Honolulu, rejoint 1.4 milliard
de téléspectateurs dans 54 pays.
Ce
spectacle est le dernier grand moment d’Elvis, sa dernière apparition en tant
que superstar. L’album qui en découlera fera le Billboard durant 35
semaines en plus d’occuper la première position du Billboard pendant quelques
semaines, une première pour Elvis en 9 ans.
Plus que
tout et à l’instar de ces films, cette retransmission à l’échelle planétaire
permet à Elvis de voyager à l’extérieur des États-Unis sans être contraint de
quitter le pays.
9. Faire attention à la surexposition
Selon le
Colonel Tom Parker, il faut en donner juste assez pour stimuler l’appétit des fans
et alimenter leur imagination. Dans cet esprit, il faut savoir miser sur
quelques émissions de télévision clé.
Et la
stratégie porte fruit : lors de son premier passage au Ed Sullivan Show
de la CBS le 9 septembre 1956, 82 % des foyers américains avec un
téléviseur ouvert syntonisent la prestation du King. Lors de son deuxième
passage au Ed Sullivan Show, question d’image, il teint ses cheveux en noir.
Parker
justifiera plus tard sa stratégie de visibilité en expliquant qu’il a observé
que le fait d’apparaître à la télévision dans des talk-shows était le plus
souvent néfaste pour la carrière des artistes, un constat qu’il fera à nouveau
en août 1987 lors d’une entrevue à l’émission Nightline avec Ted
Koppel.
En réalité,
comme je le mentionne dans ces entrevues avec Guy Simard du 98,5FM et Ray Cloutier du FM93, Parker craint la surexposition du King dans les médias. « S’ils peuvent voir
Elvis gratuitement, il ne paieront plus pour le voir en spectacle ou au cinéma
».
C’est le
même raisonnement qui amènera le Colonel à contacter personnellement les
producteurs des films d’Elvis chaque fois qu’un film sera diffusé «
gratuitement » à la télévision traditionnelle.
10. Planifier «
l’après-carrière »
À sa mort,
Elvis laisse derrière lui une fortune estimée à 150 millions de dollars. Mais
très vite, Parker comprend l’extraordinaire potentiel du King sur le plan
commercial bien que celui-ci soit décédé.
Après avoir
annulé la tournée du King et contacté le père d’Elvis, le Colonel se rend
directement à New York pour rencontrer la direction de RCA car il anticipe des
ventes records d’albums dans les jours qui vont suivre le décès du King. Parker
veut s’assurer que RCA va alimenter chaque magasin de disques à travers le
pays.
Dans un
deuxième temps, Parker rencontre Harry « the Bear » Geisler, un jeune homme de
48 ans qui est devenu millionnaire du jour au lendemain en vendant des affiches
et des t-shirts de Farrah Fawcett au début 1977. Son entreprise, Factors ETC
Inc., détient les droits de la célèbre photo de Fawcett ainsi que sur des
produits liés aux films Star Wars et Rocky.
Le Colonel
veut s’assurer de maximiser les revenus du King « après » sa mort et signer une
entente du type Farrah Fawcett. À un
journaliste qui l’interroge sur la fin du King, il dira le plus sérieusement du
monde : « Elvis n’est pas mort. Son corps l’est mais cela ne signifie
rien. Cela ne change rien ».
Sur ce
plan, l’industrie de la musique et du spectacle doit une fière chandelle au
Colonel Parker, l’inventeur à plusieurs égards de « l’image du défunt». En
1979, le Colonel a déjà négocié plus de 160 ententes pour lequelles il reçoit
50 % des profits.
Ce qui
faisait dire à Parker, interviewé en 1968 par le journaliste Chris
Hutchins : « C’est vrai, je demande 50 % des revenus du King. Mais
attendez, j’y pense, ce n’est pas vrai. C’est Elvis qui prend 50 % de chaque
sou que je gagne. »
En 1982,
après un long procès, le Colonel est condamné à remettre les enregistrements
des 350 concerts du King, les films et les émissions de télévision en échange
de 2 millions $ par an, un chèque de 225 000 $ des héritiers du King et des
paiements mensuels de 40 000 $ jusqu’en 1987.
C’était
sans compter sur la petite surprise que réservait le Colonel aux survivants du
King.
Quelques
jours après avoir signé le contrat qui le séparait définitivement du King, le
Colonel Parker entre en contact avec les gestionnaires du chanteur décédé afin
de leur mentionner qu’il a toujours en sa possession des objets du King (35
tonnes de matériels dans les faits) et qu’il compte en faire un musée afin de
compétitionner Graceland : contrats, photographies, télégrammes, lettres,
œuvres d’art, vêtements, etc.
Au moment
de prendre possession des droits sur l’image d’Elvis en 1983, la succession du
King, avec à sa tête Priscilla Presley dans le rôle de la gestionnaire en chef
(en attendant la majorité de Lisa Marie Presley), prépare la stratégie
post-Elvis en s’inspirant fortement du Colonel.
Graceland
devient la plaque tournante du plan marketing de la succession Presley. De nos
jours, seule la Maison-Blanche attire davantage de touristes annuellement aux
États-Unis.
Au final,
Elvis Presley est avec les Beatles, l’un des premiers artistes à utiliser le
marketing pour positionner et mener de front une carrière musicale dans les années 60.
Le King
aura donné plus de 1156 concerts aux États-Unis, 3 au Canada (Vancouver, Toronto et Ottawa - il devait faire un spectacle à Montréal mais le Cardinal Léger a fait des pressions pour annuler le show du King) et 525 spectacles
à Las Vegas.
Il a aussi
tourné dans 31 films, remporté trois Grammys et vendu 600 millions d’albums à
travers le monde (certaines années 50 % de toutes les ventes d’albums de RCA).
À bien des
égards, le Colonel Parker a été le premier gérant à construire l’image d’un
chanteur dans les moindres détails, une approche qui a inspiré assurément plusieurs gérants par la suite dont René Angélil, agent artistique de Céline Dion et grand fan du Colonel Parker.